Les sorties à faire autour de Paris pour s’évader le temps d’une journée ne manquent pas, à commencer par les endroits ultra-connus et, de ce fait, très touristiques (Disneyland Paris ou le château de Versailles, pour ne citer qu’eux !). En revanche, il est moins probable que l’on vous ait déjà conseillé de visiter l’abbaye Notre-Dame-la-Royale, dite de Maubuisson. Et pourtant, cette ancienne abbaye cistercienne aujourd’hui devenue un site d’art contemporain vaut le détour, que vous soyez passionné d’art, féru d’histoire ou amoureux de la nature.
Un peu d’histoire…
Fondée en 1236 par la reine Blanche de Castille, l’abbaye Notre-Dame-la-Royale fut rattachée à l’ordre cistercien en 1244. Comme l’indique son nom, elle était « réservée » aux classes les plus nobles : durant ses deux premiers siècles d’existence, elle remplit aussi bien le rôle de résidence princière que celui de refuge pour jeunes filles nobles et de nécropole royale. La plupart des religieuses de l’Abbaye étaient recrutées parmi de grandes familles aristocratiques.
L’abbaye Notre-Dame-la-Royale connut une très belle croissance, en particulier au cours du XVIIème siècle : grâce à un investissement d’argent important, le couvent et le parc se modernisèrent et, dans la deuxième moitié du siècle, les entrées étaient plus importantes que les décès, ce qui faisait croître le nombre des religieuses. Mais cet effectif chuta considérablement au XVIIIème siècle, entraînant le déclin progressif de Notre-Dame-la-Royale : en 1787, Louis XVI fit exiler l’abbesse et refusa à l’abbaye le droit de recevoir de nouvelles religieuses.
En 1793, l’abbaye devint un hôpital militaire avant d’être vendue quatre ans plus tard. Certains de ses bâtiments furent démolis, d’autres furent d’abord réquisitionnés pour divers usages (le logis abbatial abrita une filature pendant quelques années, avant de disparaître à son tour). En 1947, les bâtiments restants furent classés Monuments historiques et des travaux de consolidation furent engagés. Entre-temps devenue propriété du Conseil départemental du Val d’Oise, l’abbaye de Maubuisson a ouvert ses portes au public en 1987 : elle est aujourd’hui un centre d’art contemporain qui accueille des expositions et des manifestations artistiques.
En parlant d’art contemporain…
Actuellement et jusqu’au 27 août, l’abbaye de Maubuisson présente une exposition de l’artiste Stéphane Thidet intitulée Désert. Le travail de Stéphane Thidet est à mi-chemin entre la sculpture et l’installation. Dans cette exposition, il mêle ces deux techniques pour créer un univers bien particulier, qui emprunte des éléments de l’astrologie et de la géologie. L’exposition est découpée en quatre parties, que l’on suit dans un ordre spécifique :
- L’installation sonore D’un soleil à l’autre. La pièce où elle se trouve est plongée dans le noir, mis à part une faible lumière qui provient de deux disques de métal censés représenter des astres. Grâce à une antenne installée dans le parc et qui capte les fréquences du champ magnétique du soleil et les renvoie à l’intérieur de la pièce, les deux disques de métal vibrent à la manière d’un gong et retransmettent ces fréquences, habituellement inaudibles à l’oreille humaine. Ces sons répétitifs associés à l’absence quasi complète de lumière créé une atmosphère très singulière, presqu’apaisante. Mais nous déconseillons cette pièce aux claustrophobes !

- L’œuvre symbolique Insomnies. La salle du chapitre est occupée par des rangés de lits dont le matelas est traversé par des arbrisseaux de gattiliers. Cet arbre était utilisé au Moyen-Âge pour protéger les lieux sacrés des « plaisirs de la chair ». Une tradition qui remonte à l’Antiquité, où l’on disait que remplir son matelas avec du gattilier permettait aux prêtresses de rester pures.

- L’installation in situ Un peu plus loin. Stéphane Thidet s’est inspiré d’un phénomène bien connu en Californie et que l’on ne parvient pas vraiment à expliquer : les rochers qui se déplacent à la surface du lac asséché Racetrack Playa. L’œuvre est composée de deux élements : une couche d’argile parcourue de fissures représentant le lac asséché et des pierres posées à sa surface, suivies de longues empreintes creusées dans l’argile comme si elles s’étaient déplacées.

- La projection vidéo Half Moon. Réalisées dans le jardin de la Villa Montalvo à Saratoga, Californie, cette courte vidéo qui passe en boucle est filmée comme par une caméra de vidéosurveillance. L’atmosphère qui règne d’un bout à l’autre du film est plutôt angoissante : la scène se passe de nuit et montre une ribambelle d’animaux qui se baladent dans le jardin. On ne distingue aucune présence humaine mais on la devine, d’abord par le pique-nique qui a pu être abandonné ou bien laissé là exprès pour les animaux (à chacun son interprétation !), ensuite par les bruits lointains d’une sirène qui se joint au son strident et répétitif des grillons.
L’exposition nous a plu pour une multitude de raisons : les symboles, le travail de réflexion de l’artiste, le fil rouge entre quatre installations pourtant très différentes les unes des autres… à vous d’en trouver d’autres !
Pour les curieux, un film documentaire d’environ dix minutes est également projeté dans une autre pièce…
Informations pratiques
- Abbaye de Maubuisson, Avenue Richard de Tour, 95310 Saint-Ouen-l’Aumône
- Ouvert tous les jours de la semaine sauf le mardi, de 13h à 18h. Le week-end de 14h à 18h.
- Accessible depuis Paris par le RER C en direction de Pontoise, arrêt Saint-Ouen-l’Aumône.
- Exposition Désert jusqu’au 27 août 2017.